Roman

Une ville à cœur ouvert

« Dans la rue Akademicka, il y avait un café, le Sniégourochka, « la fille des neiges », composé de deux salles identiques dans deux immeubles mitoyens, où travaillaient des jumelles monozygotes aux cheveux violets. Elles servaient dans des soucoupes en métal les fameuses glaces plombières à la crème fraîche auxquelles on pouvait ajouter, selon son envie, de la confiture, du chocolat ou des noisettes. »

Zanna Sloniowska, Une ville à coeur ouvert, Éditions Points, 2019, p. 75.

Motivations initiales
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Ayant la chance de faire partie du jury du Prix 2019 du meilleur roman des lecteurs de POINTS, nous avons reçu les premiers livres de la sélection, dont celui-ci.

Septième lecture, septième chronique.

Synopsis

Mémé Stasia, Aba, Marianna et la narratrice, la fille de cette dernière, sont comme la personnification des différentes « époques » de la vie de la ville de Lviv. Fondée par Daniel Ier, prince ruthène, en 1256, la ville a connu une histoire agitée. Capitale de la Galicie-Volhynie, elle est annexée par la Pologne en 1386, sous le nom de Lwów, et reste polonaise jusqu’en 1772. De cette date jusqu’à 1918, elle est autrichienne, sous le nom de Lemberg, avant d’être rebaptisée Lviv et de devenir la capitale d’une éphémère République populaire d’Ukraine occidentale. Mais sa population est toujours majoritairement d’origine polonaise. Après la disparition de l’Ukraine occidentale, elle revient à la Pologne, jusqu’en 1939, période pendant laquelle elle retrouve son nom de Lwów. En septembre 1939, la région est envahie par l’Allemagne, la ville est cernée par la Wehrmacht : aux termes du Pacte germano-soviétique, elle revient à l’URSS et est rattachée à la République socialiste soviétique d’Ukraine sous le nom de Lvov. Mais dès 1941, les nationalistes ukrainiens font parler d’eux, en s’en prenant aux nombreux juifs présents dans la ville – on parle ici de plus de 100 000 personnes. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, les polonais survivants sont déplacés en Silésie. La ville, très abîmée par les combats, est alors quasi-déserte – les juifs et les polonaise représentaient, avant-guerre, plus de 80% de la population. Enfin, avec la dissolution de l’URSS, Lviv est rattachée à l’Ukraine en 1991.

Avis

> L’avis de T

L’idée de départ est très séduisante : faire d’une ville l’un des personnages centraux, voire le personnage central d’un livre. Mais, en refermant ce livre, force est de constater que cette histoire m’a laissé sur le bord du chemin. La ville, même lorsque c’est Mikolaj, artiste passionné qui sait lire les traces de l’histoire dans les murs et les façades, me laisse la sensation d’une ville abîmée, salie, dégradée.

Est-ce parce que je ne comprends pas totalement pourquoi ce même Mikolaj, amant de Marianna, devient finalement l’amant de sa fille ?

En fait, tous ces personnages m’ont parus tristes, blasés et peu intéressants. À aucun moment je n’ai réussi à me laisser porter par la poésie de ce texte, qui n’en manque pourtant pas. Et je le regrette, parce que ces villes d’Europe centrale, riche d’une histoire complexe – le synopsis en donne une idée, même si c’est encore très survolé – ont un côté fascinant.

Je n’ai vu que les trous dans les façades, que le crépi qui tombe, que l’usure du temps. Et, chez les personnes, que les sentiments médiocres, la jalousie, l’envie, le renoncement. Je n’ai pas su les voir transfigurés par l’amour ou la volonté de résister. Même le personnage de Marianna, tuée par une balle lors d’une manifestation antisoviétique au tout début du livre, n’échappe pas à cette impression d’inéluctable. Elle, la chanteuse d’opéra, aurait pu être une héroïne, mais elle nous est surtout présentée comme une mère absente, peu investie, assez égoïste, et qui se laisse porter par les événements. Bref, ce livre n’était pas pour moi…

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