Drame, Roman

La fraternité

« Depuis toujours, je rêvais d’avoir des amis, de faire partie d’un cercle, et ce rêve était devenu réalité par le biais d’une imposture. Alex m’avait dit que je devais élucider un crime au Pitt Club. Certains membres de ce club étaient bizarres quand ils parlaient de femmes, comme s’ils n’avaient pour elles que du mépris, mais le plus bizarre, pour moi, c’était les femmes qui le savaient et venaient quand même aux soirées. »

Takis Würger, La fraternité, Slatkine & Cie, 2018, p. 97.

Motivations initiales

L’équipe de Slatkine & Cie nous a très gentiment proposé de découvrir ce livre d’un auteur allemand que nous ne connaissions pas. Nous avons accepté avec grand plaisir.

Synopsis

Hans est, en quelque sorte, un miraculé. Il nait alors que sa mère, atteinte d’un cancer inopérable, semble condamnée. Mais la vie dans la forêt – dans le sud de la Basse-Saxe, en Allemagne -, au milieu des plantes, de la nature, semble lui réussir. Et c’est finalement son père qui disparait le premier, alors qu’il a quinze, renversé par un camion.

Six mois plus tard, sa mère s’éteint, et voilà Hans orphelin. Sa tante, Alex – dont il a découvert l’existence seulement quelques années plus tôt -, professeur d’histoire de l’art à l’université de Cambridge, et en proie à des difficultés psychologique, sait ne pas être capable de s’occuper de lui. Elle le place dans un orphelinat en Bavière.

Là, il découvre la vie en communauté – difficilement -, mais également la boxe.

Lorsqu’il a 18 ans, Alex lui demande de la rejoindre à Cambridge. Elle lui confie la mission d’être accepté dans une fraternité, le club de boxe de Cambridge. Elle souhaite qu’il l’aide à résoudre un crime, mais sans lui révéler de quoi il s’agit. Pour l’accompagner, elle le « confie » à Charlotte, sa doctorante.

Que cachent tous ces mystères ? Qu’est-ce qui est véritablement à l’œuvre derrière tout cela ?

Avis

> L’avis de T

Le tour de force de ce livre, c’est qu’il opère avec élégance la transition d’une histoire qui semble commencer plutôt bien vers un drame terrible, dont on sait, en refermant le livre, qu’il aura encore des conséquences après ce qui nous est raconté. Et qu’il aborde de très nombreux sujets, parfois d’une simple touche, en passant, au travers de l’intervention d’un seul personnage.

Il laisse donc une large place à la réflexion. Sont ainsi évoqués le pouvoir, l’attrait qu’il provoque, sur les hommes et les femmes ; la nation d’effort, de travail, de volonté, de souffrance. La manipulation, également, est au cœur de cette histoire. Mais également les relations entre hommes et femmes, la mondialisation, l’homosexualité… On le voit, le panel est vaste.

Dans sa forme, le livre est organisé par chapitre, chacun ayant un narrateur dont le nom nous est indiqué. Hans, Alex, Charlotte sont évidemment ceux qui reviennent le plus souvent, d’autres personnages, plus secondaires, n’apparaissent qu’une fois ou deux. Mais chacun apporte sa pierre à l’édifice.

Bien que le sujet soit lourd, cela reste très facile à lire. Les personnages sont bien décrits, dans leur complexité, avec leurs faiblesses et leurs cassures. Ils sont suffisamment complexes pour être crédibles. Ainsi, Hans, qui arrive avec un petit complexe d’infériorité, est attiré par le côté brillant du Club, même s’il sait y être entré pour « enquêter » sur des faits graves.

Ma seule interrogation porte sur le choix fait par l’auteur de placer son histoire dans une fraternité de Cambridge. Pourquoi un auteur allemand, qui place le début de son histoire en Allemagne, choisit-il de placer cette histoire en Angleterre ? Est-ce parce que Cambridge incarne ces milieux de pouvoir, ce groupe de happy few qui pensent que tout leur est permis ? Mais des écoles select de ce genre, avec probablement le même type de problématiques, existent probablement en Allemagne, ou, à coup sûr, en Suisse. Est-ce parce qu’elles sont moins connues du grand public que Takis Würger a choisi de délocaliser vers l’Angleterre ?

Enfin, une dernière remarque : la couverture du livre, avec ses papillons, m’a posé question. Et, une fois que l’on a terminé le livre, elle devient franchement inquiétante. Bravo pour ce choix, qui est à la fois esthétique et tellement adapté à ce livre…

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